[Journal Club] Structure du site à fer dans la protéine d’échafaudage ISCU initiant l’assemblage des clusters fer-soufre

Des chercheurs du groupe Biologie Redox et Maladies de l’institut de Biologie Intégrative de la Cellule à Gif-Sur-Yvette, de l’Université de Kaiserslautern en Allemagne, de l’Institut de Chimie des Substances Naturelles à Gif-Sur-Yvette, du Synchrotron SOLEIL et du laboratoire de Bioénergétique et Ingénierie des Protéines à Marseille ont déterminé la structure du site de fixation du fer dans la protéine d’échafaudage des clusters fer-soufre en combinant des analyses par spectroscopies CD, Mössbauer, RMN, XAS et RPE. Ces résultats sont publiés dans J. Am. Chem. Soc. (2022), 144, 17496-17515.

Le fer est un cofacteur de nombreuses protéines et enzymes. Il est utilisé sous différentes formes notamment en clusters fer-soufre (Fe-S) qui sont des assemblages d’ions fers et sulfures dont les structures les plus communes sont les clusters [2Fe2S] et [4Fe4S]. Ces clusters sont biosynthétisés via un processus multi-étapes complexe dont le mécanisme est encore mal compris. Les clusters [2Fe2S] sont assemblés sur une protéine d’échafaudage appelée ISCU. Une étude précédente sur la protéine ISCU de souris avait montré par spectroscopies Mössbauer et CD que l’étape initiale de ce processus est l’insertion d’un ion Fe2+ dans le site d’assemblage, caractérisé par la présence de plusieurs résidus cystéine, mais la structure exacte du site restait à déterminer. De plus, des analyses de protéines ISCU provenant d’autres organismes (Thermotoga maritima, Saccharomyces cerevisiae, Drosophila melanogaster and Homo sapiens) avaient montré par spectroscopie d’absorption des rayons X (XAS) que le fer se fixe dans un environnement ne comportant aucun résidu cystéine, uniquement des ligands azotés et oxygénés, suggérant la présence d’un site auxiliaire dans ISCU et un mécanisme de biosynthèse différent selon les espèces.

Les équipes de Benoit D’Autréaux (I2BC, CNRS-CEA-Université Paris-Saclay), Volker Schünemann (Universität Kaiserslautern, Germany), Christina Sizun (ICSN, CNRS, Gif-Sur-Yvette), Emiliano Fonda (Synchrotron SOLEIL, Saint-Aubin) et Bénédicte Burlat (BIP, CNRS Marseille) ont montré que les études XAS précédentes ont été réalisées sur des protéines ISCU agrégées car en absence de métal la protéine ISCU existe sous une forme déstructurée tendant à s’agréger. En travaillant sur les formes monomériques de protéines ISCU de différentes espèces (Escherichia coli, Chaetomium thermophilum, Mus musculus and Homo sapiens), ces équipes ont montré que le fer se fixe dans le site d’assemblage et ils ont obtenu la première structure du site à fer d’une protéine ISCU. Les analyses combinées par spectroscopies CD, Mössbauer, RMN, XAS et RPE ont montré que le fer se fixe sous forme mononucléaire dans un état Fe(II) haut-spin (S=2) via des acides aminés strictement conservés du site d’assemblage: deux cystéines (Cys35, Cys61), un aspartate (Asp37) et une histidine (His103), avec une troisième cystéine (Cys104) à très courte distance qui est le récepteur du soufre. Ils ont de plus montré qu’en absence de l’histidine 103, dans un mutant H103A, la cystéine 104 vient la remplacer, ce qui pourrait être un élément clé du processus d’insertion de soufre dans ISCU.